dimanche 21 décembre 2014

mortifère sevrage

Nicolas de Staël, La lune, 1953



Qu’elle ne comprend pas, dit-elle, mon petit traité sur la deuxième personne du singulier, qui est la plus terrible de toutes les personnes, et je ne peux pas lui expliquer, parce que je ne me rappelle plus ce que j’ai écrit, dès que j’ai écrit quelque chose, j’oublie ce que j’ai écrit, je lui dis : ce que j’ai écrit, ce n’est pas important, j’étais dans un état de paumerie assez flagrant, ça fait des murmures & des lallations, je cherche mes mots, et les langues me fourchent, ça donne des bribes de parler toscan et des lambeaux de patois letton, pour dire que la cure de sevrage est une faillite, la cure de sevrage ne me convient pas, la cure de sevrage phagocyte mes molécules une par une, et les refrains que j’arrive encore à fixer figer au bout de ma plume préparent la parodie de mon auto-oraison funèbre passablement kitsch

Le murmure du monde, vol. VII - inédit




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